Contentieux de l’urbanisme

Implantation d’un immeuble collectif dans une zone caractérisée par un habitat mixte – Atteinte au caractère et à l’intérêt des lieux avoisinants (non)

Par un arrêt du 5 octobre 2023, la cour administrative d’appel de Lyon a censuré un arrêté de refus de permis de construire portant sur la démolition d’une maison individuelle et de ses annexes, et la construction d’un immeuble collectif en R+5. Elle a jugé que ce projet ne porte pas atteinte au caractère et à l’intérêt du site, des lieux avoisinants et des paysages urbains environnants au sens de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme, dont l’esprit a été repris dans un article du réglement du PLU applicable.

Au cas d’espèce, le bâtiment projeté ne se trouvait ni dans le champ de visibilité d’un monument historique, ni dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou d’un site classé ou protégé, mais dans une zone caractérisée par un habitat mixte comprenant des constructions de variété architecturale, où sont d’ores et déjà implantés des bâtiments d’habitat collectif d’un volume comparable à celui du projet, voire beaucoup plus imposants, sans présenter aucun intérêt architectural.

Dans cet arrêt , la cour administrative d’appel de Lyon a fait application d’une jurisprudence constante du juge administratif qui raisonne en deux temps : dans un premier temps, il apprécie la qualité du site sur lequel la construction s’implante, et dans un second temps, il évalue l’impact de la construction concernée compte tenu de sa nature et de ses effets sur le site (cf. CE, 13 juillet 2012 n° 345970, Rec. Leb).

7. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de délivrer le permis de construire litigieux, le maire de Dijon a estimé que le projet concerné qui consiste en la démolition totale d’une maison individuelle et de ses annexes pour construire un immeuble collectif d’habitation de cinq niveaux ne respectait pas les dispositions de l’article 7 du règlement du plan local d’urbanisme, relatif à la qualité urbaine architecturale, environnementale et paysagère, applicables en zone U. Pour ce faire, le maire a retenu, d’une part, que ” le projet d’immeuble s’inscrit dans un quartier de périphérie du centre-ville bordé par la voie ferrée, comportant une mixité d’habitat de pavillons individuels et de petits et moyens collectifs. L’ensemble formant une harmonie d’aspect par les traitements qualitatifs des bâtis et dans les traitements soignés des espaces verts largement plantés. “. Il ressort toutefois des pièces du dossier, que le projet concerne un bâtiment, qui ne se trouve ni dans le champ de visibilité d’un monument historique, ni dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou d’un site classé ou protégé, et qui est situé dans une zone caractérisée par un habitat mixte comprenant des constructions de variété architecturale, où sont d’ores et déjà implantés des bâtiments d’habitat collectif d’un volume comparable à celui du projet, voire beaucoup plus imposants, à l’instar de l’immeuble jouxtant le terrain d’assiette du projet qui s’élève à une hauteur de R+12 et ne présente aucun intérêt architectural. A environ 80 mètres du projet, se trouvent également implantés des bâtiments d’habitation collective de cinq et six niveaux ne présentant aucun intérêt architectural. Enfin, les photographies produites à l’instance montrent la présence dans ce quartier, à proximité de la voie ferrée d’un entrepôt et de plusieurs immeubles collectifs imposants et sans valeur esthétique. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet concerné prendrait place dans un quartier présentant un intérêt urbain particulier.


8. Pour s’opposer à la réalisation du projet, le maire a relevé, d’autre part, que ” le traitement architectural de l’immeuble projeté ne favorise pas son intégration dans l’environnement proche : un patchwork de couleurs sur les façades (trois teintes d’enduit en plus du zinc sur rue, quatre teintes d’enduit sur la façade arrière), un encadrement partiel des balcons créant une ” boîte ” qui alourdit la façade sur rue ” et que ” la multiplicité des effets ( balcons, gardes-corps, casquettes…) cumulés au teintes multiples, aboutissent à une cacophonie architecturale notamment sur la façade sur rue, visible depuis l’espace public “. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet en litige, intègre des modifications par rapport aux deux premiers dossiers qui avaient auparavant été présentés, afin de tenir compte de précédentes recommandations émises par l’architecte des bâtiments de France, en vue de favoriser son insertion dans le paysage urbain existant. Ainsi, le projet prévoit notamment d’ajouter une rangée de plantations en façade Nord, de remplacer la teinte ” Rouge Burgos ” en façade, par une teinte ” Lie de vin “, plus foncée et plus discrète, tout en réduisant cette bande de couleur, de supprimer la teinte ” gris Belfast ” au niveau de l’attique pour créer un attique en zinc prépatiné, d’apparence plus traditionnelle, et d’améliorer l’harmonie par la pose de menuiseries en aluminium au niveau des balcons. Dans ces conditions, il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que ce projet serait de nature à porter atteinte à l’intérêt du site d’implantation. Dès lors, la requérante est fondée à soutenir qu’en refusant de lui délivrer le permis de construire sollicité au motif que le projet était de nature à porter atteinte au caractère et à l’intérêt du site, des lieux avoisinants et des paysages urbains environnants, le maire a commis une erreur d’appréciation, quand bien même l’architecte des bâtiments de France a émis, à titre consultatif, un avis défavorable au projet, le 15 janvier 2021. Dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal a estimé que son projet était de nature à porter atteinte au caractère et à l’intérêt patrimonial des lieux et a par suite écarté le moyen tiré de l’existence d’une erreur d’appréciation sur le fondement de l’article 7 du règlement du plan local d’urbanisme, relatif à la qualité urbaine architecturale, environnementale et paysagère, applicables en zone U.

CAA de Lyon, 5 octobre 2023, n° 22LY00648

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