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Recours Tarn-et-Garonne sans mesure de publicité appropriée – Application d’un délai raisonnable d’un an (oui)

Dans une décision en date du 25 avril 2022, la cour administrative d’appel de Marseille s’est prononcée sur l’application d’un délai raisonnable d’un an à l’introduction d’un recours en validité d’un contrat administratif (recours dit « Tarn-et-Garonne ») en l’absence de mesure de publicité appropriée.

En l’espèce, un concurrent évincé demandait l’annulation d’un marché public à bons de commande ayant pour objet la fourniture d’heures de vol d’aéronef pour assurer des essais de matériel et l’entrainement des forces de la Marine nationale. Le pouvoir adjudicateur ayant soulevé en défense un moyen relatif à la tardiveté de la requête, la question du délai de recours applicable s’est posée.

La juridiction a commencé par rappeler qu’un tel recours en validité du contrat doit, en principe, être introduit dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées (point n°3 de la décision commentée).

Cependant, au cas présent, l’avis d’attribution publié par le pouvoir adjudicateur ne mentionnant pas les modalités de consultation du contrat, il ne constituait pas une « mesure de publicité appropriée » au sens de la jurisprudence Tarn-et-Garonne. Par conséquent, le délai de deux mois pour introduire un recours en validité du contrat n’était pas opposable à la société requérante (point n°4).

La cour a alors considéré que le principe de sécurité juridique impliquait que soit appliqué un “délai raisonnable”, en principe inférieur à un an à compter de la publication de l’avis d’attribution du contrat :

 5. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment un contrat administratif. Dans le cas où l’administration a omis de mettre en oeuvre les mesures de publicité appropriées permettant de faire courir le délai de recours de deux mois, un recours contestant la validité du contrat doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter de la publication de l’avis d’attribution du contrat. En règle générale, et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable.

Point n°5 de la décision CAA de Marseille, 25 avril 2022, n°19MA05387

En l’espèce, la société ayant introduit son recours plus d’un an après la publication de l’avis d’attribution, ses conclusions contestant la validité du contrat ont été rejetées comme tardives par la juridiction.  

Cette décision tend donc à reconnaître l’application d’un délai raisonnable, déjà reconnue pour la contestation des décisions administratives individuelles non ou mal notifiées depuis l’arrêt Czabaj (CE, 13 juillet 2016, n°387763), à l’introduction des recours en contestation de la validité des contrats administratifs.

C’est la première fois qu’une cour administrative d’appel applique directement cette solution, qui marque ainsi un pas de plus vers le renforcement de la sécurité juridique des contrats administratifs, au détriment de la possibilité pour les tiers de les contester dans le temps (bulletin à paraître bientôt sur notre blog).

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