Promesse unilatérale de vente – Antérieure au 1er octobre 2016 – Rétractation du promettant – Exécution forcée (oui) – Rétroactivité de la jurisprudence (oui)
Par une décision du 21 novembre 2024 publiée au bulletin, la Cour de cassation a confirmé que la rétractation du promettant de vendre n’interdit pas l’exécution forcée de la vente par le bénéficiaire même lorsque la promesse unilatérale a été conclue avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 tout en venant opérer une rétroactivité de sa jurisprudence.
En l’espèce, en 1971 une promesse unilatérale de vente conclue pour 4 années et tacitement prorogée, devait prendre fin un an après la mise en service d’une rocade à proximité de la parcelle (dont le principe de la construction était acquis). En 2011, le promettant a indiqué au bénéficiaire qu’il considérait la promesse caduque et en 2016, le bénéficiaire a levé l’option dont il disposait.
Sans réponse du promettant, le bénéficiaire a assigné ce dernier en réalisation forcée de la vente et la cour d’appel d’Aix en Provence, dans un arrêt du 5 janvier 2021, a rejeté cette demande au motif que la révocation du promettant était valable dans la période de levée d’option du bénéficiaire.
Pour rappel, avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, la rétractation du promettant avant la levée de l’option du bénéficiaire n’ouvrait droit à ce dernier qu’à une action en indemnisation de son préjudice en dommages et intérêts.
L’ordonnance du 10 février 2016, créant l’article 1124 du code civil, a modifié l’état du droit pour les promesses conclues après le 1er octobre 2016 en ce que « la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis ».
Cependant, la Cour de cassation avait opéré un revirement de jurisprudence par une décision du 23 juin 2021 (n° 20-17.554), en jugeant que le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente conclue antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016 pouvait demander l’exécution forcée de la vente en cas de rétractation du promettant durant le délai de levée de l’option.
Dans cette affaire, la Cour de cassation est venue censurer la cour d’appel d’Aix en Provence en jugeant que :
11. Alors qu’il était jugé antérieurement, en matière de promesse unilatérale de vente, que la levée de l’option, postérieurement à la rétractation du promettant, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, de sorte que la réalisation forcée de la vente ne pouvait être ordonnée, la violation, par le promettant, de son obligation de faire ne pouvant ouvrir droit qu’à des dommages-intérêts, la Cour de cassation, procédant à un revirement de jurisprudence, juge, depuis une décision du 23 juin 2021 (3e Civ., pourvoi n° 20-17.554, publiée) que la promesse unilatérale de vente étant un avant-contrat qui contient, outre le consentement du vendeur, les éléments essentiels du contrat définitif qui serviront à l’exercice de la faculté d’option du bénéficiaire et à la date duquel s’apprécient les conditions de validité de la vente, le promettant s’oblige définitivement à vendre dès la conclusion de l’avant-contrat, sans possibilité de rétractation, sauf stipulation contraire.
12. Bien qu’énonçant que la révocation de la promesse par le promettant pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter ne peut empêcher la formation du contrat promis, l’arrêt retient qu’il n’est pas possible en pareil cas d’ordonner la réalisation forcée de la vente, s’agissant d’une obligation de faire ne se résolvant qu’en dommages-intérêts.
13. En statuant ainsi, se conformant à l’état de la jurisprudence à la date du prononcé de son arrêt, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Cour de cassation, 3ème civ., 21 novembre 2024, 21-12.661, Bull.
Autrement dit, la Cour de cassation impose, en la matière, une rétroactivité de sa jurisprudence.