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Jurisprudence cabinet – Qualité à agir – Cahier des charges d’un lotissement – Effet relatif des contrats – Assimilation de différents propriétaires d’un même lot à des co-lotis au sens du cahier des charges (non) – Fin de non-recevoir (oui)

Par une décision en date du 2 mai 2024 (RG n°23/02844), la cour d’appel de Bordeaux est venue apporter des précisions sur l’appréciation de la qualité à agir pour se prévaloir des dispositions d’un cahier des charges de lotissement en présence de différents propriétaires d’un même lot.

En l’espèce, des requérantes nues-propriétaires de parcelles se prévalaient de violations du cahier des charges de leur lotissement et ont fait assigner le propriétaire d’une parcelle voisine en démolition de travaux résultant d’une autorisation d’urbanisme purgée de tout recours.

Les parcelles respectives des parties étaient issues d’une division d’un lot de lotissement intervenue antérieurement à l’occasion d’une vente. Cette division était cependant prohibée par les dispositions du cahier des charges du lotissement.

En défense, il était soutenu que, si le cahier des charges du lotissement s’impose entre les différents co-lotis, c’est-à-dire entre propriétaires de lots différents, il n’est pas opposable entre propriétaire au sein d’un même lot de sorte que les requérantes n’avaient pas qualité pour invoquer les dispositions dudit cahier des charges.

Les requérantes avaient alors soutenu :

  • d’une part, que le défendeur avait reconnu dans son acte d’acquisition être lié par le cahier des charges ;
  • d’autre part, que la division du lot en plusieurs parcelles avaient eu pour objet de créer une indivision de sorte que chacun des propriétaires indivis ne pouvaient jouir du bien qu’en conformité avec la destination du lot et qu’il pouvait chacun agir en conservation du bien indivis ;
  • enfin, que le bon sens devait s’opposer à un paradoxe qui interdirait au détendeur de droits dans un lot d’agir contre un autre détendeur de droits dans ce lot.

Si en première instance le raisonnement du défendeur avait été écarté, la Cour d’appel de Bordeaux juge que :

« Le jugement attaqué a procédé par simple affirmation en assimilant le cas des différents propriétaires au sein d’un même lot à celui des co-lotis.

Or, comme le soutient à juste titre l’intimé, il est admis que le cahier des charges d’un lotissement présente un caractère contractuel et engage tous les co-lotis entre eux, c’est-à- dire les propriétaires des différents lots.

En raison de l’effet relatif des contrats, ses dispositions ne sont pas opposables aux rapports aux titulaires de droits sur un même lot, dans leurs rapports entre eux.

La division au sein d’un même lot, non autorisée par le cahier des charges, est donc une situation qui, au regard de ce dernier, n’existe pas.

Ainsi, du point de vue des relations contractuelles issues du cahier des charges, les propriétaires de parcelles au sein d’un lot divisé en méconnaissance de ce dernier sont considérés comme propriétaires d’un seul et même lot. »

Par voie de conséquence, la cour d’appel de Bordeaux a fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par le défendeur et a ainsi déclaré irrecevable la demande en démolition des ouvrages.

Cour d’appel de Bordeaux, 2ème civ., 2 mai 2024, n°23/02844

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