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Parc éolien – DDEP – Cigogne noire – Risque suffisamment caractérisé (oui)

Dans une décision du 30 avril 2025, la cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé qu’un projet de parc éolien, composé de 7 aérogénérateurs et d’un poste de livraison, comportait un risque suffisamment caractérisé de destruction pour la cigogne noire et nécessitait, en conséquence, une dérogation « espèces protégées ».

La cour relève d’abord que :

10. Il résulte d’études générales jointes au dossier, que la cigogne noire, espèce diurne, solitaire, farouche et discrète, est un oiseau à grand territoire qui niche en forêt. En période de nourrissage des jeunes, elle capture ses proies, qui sont essentiellement des proies aquatiques, en se déplaçant dans les eaux peu profondes, jusqu’à une vingtaine de kilomètres du nid. L’espèce est connue pour revenir plusieurs années de suite dans les mêmes secteurs pour nidifier, selon une moyenne en France de sept ans. Les œufs, pondus entre fin mars et mai, éclosent entre fin avril et début juin, les jeunes séjournant ensuite au nid entre 63 et 71 jours.

Elle relève ensuite que :

  • la présence de la cigogne noire a été observée en périodes de nidification et en période migratoire, dans les zones tampon de quatre et dix kilomètres autour du parc éolien projeté ;
  • le projet est situé à l’intersection de 3 nids de cigogne noire, localisés sur une carte de la DREAL, laquelle identifie également les périmètres de nidification de cette espèce, dont « un secteur très sensible de nidification qualifié d’enjeu majeur, de dix kilomètres et un domaine vital d’alimentation de vingt kilomètres autour des nids » ;
  • le projet est également situé à l’intérieur des trois périmètre vitaux de vingt kilomètres autour des trois nids et à la limite des trois secteurs très sensibles de dix kilomètres autour de ces nids.

Par suite, la cour juge que :

Dans ces conditions, bien qu’il ne soit pas établi qu’elle soit revenue depuis 2023 dans le secteur pour nidifier, la fréquentation du site d’implantation du projet par la cigogne noire peut être considérée comme réelle, actuelle et régulière. Or, si la pétitionnaire affirme qu’après application des mesures d’évitement et de réduction, les impacts résiduels du projet sur la cigogne noire peuvent être considérés comme faibles, que ce soit en phase de travaux ou en phase d’exploitation, il reconnait ainsi que le risque de collision avec les aérogénérateurs n’est pas nul. En raison de la menace importante d’extinction de l’espèce nicheuse en France et de ses très faibles effectifs, en particulier en région Centre-Val de Loire, il résulte de l’instruction que la mortalité d’un ou de plusieurs individus nicheurs de cigogne noire en raison d’une collision avec une éolienne du parc projeté expose cette espèce à un risque suffisamment caractérisé de destruction, qui ne pourra pas être prévenu par les mesures spécifiées dans l’arrêté attaqué et qui est de nature à justifier une dérogation  » espèces protégées « .

La cour a sursis à statuer sur le surplus des conclusions de la requête jusqu’à l’expiration d’un délai de six mois pour permettre à la société pétitionnaire de régulariser l’absence de dérogation « espèces protégées ».

CAA Bordeaux, 30 avril 2025, n° 19BX01049

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