Exception au droit de priorité – Article L. 240-2 C. urb. – Champ d’application – Société nationale SNCF, SNCF Réseau et SNCF Voyageurs
Par une décision du 4 février 2025, le Conseil d’État est venu préciser le champ d’application du droit de priorité dans le cadre de la cession d’immeubles appartenant à la société nationale SNCF.
En l’espèce, par une décision du 9 janvier 2024, l’établissement public foncier de Provence-Alpes-Côte d’Azur (« EPF PACA ») a exercé, par délégation de la commune de Sanary-sur-Mer, le droit de priorité prévu à l’article L. 240-1 du code de l’urbanisme en vue de l’acquisition de parcelles et de droits indivis, propriétés de la SNCF.
Or, la SNCF avait conclu une promesse de vente de ces biens avec une société, dont la réalisation était subordonnée à l’obtention d’un permis de construire pour la réalisation d’un programme de trente logements, dont quinze logements sociaux.
Le permis de construire ayant été délivré, la société titulaire de la promesse de vente a alors sollicité du juge des référés du tribunal administratif de Toulon la suspension de l’exécution de la décision du 9 janvier 2024.
Elle s’est ensuite pourvue en cassation contre l’ordonnance du 9 avril 2024 rejetant sa demande.
Pour rappel, aux termes de l’article L. 240-1 du code de l’urbanisme « Il est créé en faveur des communes (…) titulaires du droit de préemption urbain un droit de priorité sur tout projet de cession d’un immeuble (…) situé sur leur territoire et appartenant à l’État, à des sociétés dont il détient la majorité du capital, aux établissements publics mentionnés aux articles L. 2102-1, L. 2111-9 et L. 2141-1 du code des transports (…) en vue de la réalisation, dans l’intérêt général, d’actions ou d’opérations répondant aux objets définis à l’article L. 300-1 du présent code (…) ».
L’article L. 240-2 de ce même code prévoit que, par exception : « Les dispositions de l’article L. 240-1 ne sont pas applicables : (…) / – à l’aliénation, par l’État, (…) ou les établissements publics figurant sur la liste prévue à l’article L. 240-1, d’immeubles en vue de réaliser les opérations d’intérêt national mentionnées à l’article L. 132-1, y compris les opérations ayant ces effets en vertu du deuxième alinéa du I de l’article 1er de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement ; (…) ».
D’une part, le Conseil d’État rappelle que, depuis 2019, les articles du code des transports cités au sein des dispositions précitées du code de l’urbanisme ne mentionnent plus les établissements publics « SNCF », « SNCF Réseau » et « SNCF Mobilités », mais la société nationale SNCF ainsi que ses filiales, SNCF Réseau et SNCF Voyageurs.
Bien que l’article L. 240-2 du code de l’urbanisme conserve la référence aux « établissements publics » dans ces dispositions, le Conseil d’État relève que le législateur n’a pas voulu rendre applicable l’article L. 240-1 du code de l’urbanisme à l’aliénation d’immeubles effectuée par la société nationale SNCF et ses filiales, SNCF Réseau et SNCF Voyageurs, dans les conditions prévues par cet article.
D’autre part, le Conseil d’État juge que le programme de logements pour lequel la société requérante a obtenu un permis de construire présente un caractère d’intérêt national en application de l’article 1er de la loi du 13 juillet 2006, la commune de Sanary-sur-Mer n’ayant pas atteint l’objectif global de réalisation de logements sociaux.
Le Conseil d’État en déduit que le moyen tiré de ce que le droit de priorité n’était pas applicable à l’aliénation des parcelles en cause, vendues par la société nationale SNCF pour réaliser un programme de logements dont une partie est réalisée en logement social, est, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision en litige.
In fine, la Haute juridiction administrative annule l’ordonnance du 9 avril 2024 et suspend la décision d’exercice du droit de priorité de l’EPF PACA.
CE, 4 février 2025, Société Groupe A et A Novelis, n° 493747