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Développement et conditions d’implantation de l’agrivoltaïsme : l’amour est dans le décret

Publié au Journal officiel, le décret n° 2024-318 du 8 avril 2024 relatif au développement de l’agrivoltaïsme et aux conditions d’implantation des installations photovoltaïques sur terrains agricoles, naturels ou forestiers, précise le régime juridique applicable aux installations agrivoltaïques au regard des critères définis à l’article L. 314-36 du code de l’énergie (cf. Bulletin du 28 mars 2023 intitulé Projets photovoltaïques en zone agricole) et confirme que l’agrivoltaïsme opère une union entre les agriculteurs et les producteurs d’énergies renouvelables. L’analyse ci-après se focalise sur (I.) la définition précise des quatre services susceptibles d’être apportés à la parcelle agricole par l’installation ainsi que (II.) la distinction entre les différents types de technologies agrivoltaïques.

I. Les services apportés par l’installation visent intrinsèquement à améliorer la production

Point de vigilance préalable : afin de qualifier une installation d’agrivoltaïque, il est nécessaire de démontrer qu’elle apporte directement à la parcelle agricole au moins l’un des quatre services définis par le décret. Toutefois, l’installation ne pourra pas être qualifiée d’agrivoltaïque dès lors, notamment, qu’elle porte une atteinte substantielle à l’un de ces quatre services ou une atteinte limitée à deux de ces services.

Les services présentant une amélioration endogène de la production agricole

Parmi les quatre services qu’une installation est susceptible d’apporter à la parcelle agricole pour être considérée comme agrivoltaïque, l’article L. 314-36 du code de l’énergie identifie :

l’amélioration du potentiel et de l’impact agronomiques qui consiste en une amélioration des qualités agronomiques du sol et en une augmentation du rendement de la production agricole, ou à défaut de cette dernière condition, au maintien du rendement ou au moins à la réduction d’une baisse tendancielle observée au niveau local (art. R. 314-110).

Toute installation qui permet une remise en activité d’un terrain agricole inexploité depuis plus de cinq années peut également apporter un tel service.

l’amélioration du bien-être animal qui s’apprécie au regard de l’amélioration du confort thermique des animaux, démontrable par l’observation d’une diminution des températures dans les espaces accessibles aux animaux à l’abri des modules photovoltaïques et par l’apport de services ou de structures améliorant les conditions de vie des animaux (article R. 314-113).

Les services permettant une amélioration exogène de la production agricole 

Deux autres services visent à protéger voire améliorer la protection agricole vis-à-vis de facteurs exogènes :

l’adaptation au changement climatique, qui consiste en une limitation des effets néfastes du changement climatique se traduisant :

  • soit par une augmentation du rendement de la production agricole ou, à défaut, sur la réduction voire le maintien du taux de la réduction tendancielle observée au niveau local,
  • soit par une amélioration de la qualité de la production agricole (art. R. 314-111). La limitation des effets néfastes du changement climatique s’apprécie notamment par l’observation d’effets adaptatifs en termes d’impact thermique, d’impact hydrique ou encore d’impact radiatif.

la protection contre les aléas, qui s’apprécie au regard de la protection apportée par les modules agrivoltaïques contre au moins une forme d’aléa météorologique, ponctuel et exogène à la conduite de l’exploitation, faisant peser un risque sur la quantité ou la qualité de la production agricole à l’exclusion des aléas strictement économiques et financiers (art. R. 314-112).

 II. Le critère de la production agricole significative s’apprécie par type de technologie

Un critère évalué au regard d’une zone témoin

Pour l’ensemble des installations agrivoltaïques hors élevage, la production agricole est considérée comme significative si la moyenne du rendement par hectare observé sur la parcelle agricole est supérieure à 90% à la moyenne du rendement par hectare observé sur la zone témoin ou un référentiel en faisant office.

Cette proportion peut être réduite par le préfet, sous conditions (évènements imprévisibles ou amélioration significative et démontrable de la qualité de la production) (art. R. 314-114).

Pour les installations sur serre, les comparaisons sont réalisées par rapport à un référentiel local (résultats agronomiques et séries de données historiques).

Pour les installations sur élevage, le caractère significatif de l’activité agricole peut être apprécié au regard du volume de biomasse fourragère, du taux de chargement ou encore du taux de productivité numérique (art. R. 314-116).

L’analyse spécifique des technologies éprouvées

Parmi les installations exemptées de zone témoin (notamment celles dont le taux de couverture est inférieur à 40%, sous certaines conditions) figurent les installations utilisant une des technologies « éprouvées », dont la liste sera fixée par arrêté du ministre chargé de l’énergie et du ministre chargé de l’agriculture, en fonction du mode de culture ou d’élevage, du procédé technique photovoltaïque utilisé et de l’implantation géographique (art. 314-115).

Pour ces installations, le caractère significatif de la production agricole est apprécié au regard des données recueillies par l’ADEME qui font office de référentiel.

L’arrêté précité fixera, par type de technologie éprouvée, la valeur maximale de taux de couverture – rapport entre la surface maximale projetée au sol des modules photovoltaïques sur la parcelle agricole et la surface de ladite parcelle – pouvant permettre de garantir que la production agricole reste l’activité principale de la parcelle (article R. 314-119).

Quelques précisions

Les dispositions du décret du 8 avril 2024 s’appliquent aux installations agrivoltaïques dont la demande de permis ou la déclaration préalable est déposée à compter d’un mois après sa publication (i.e. le 9 mai 2024).

Outre les critères énoncés ci-contre, ledit décret définit deux autres critères d’identification d’une installation agrivoltaïque au sens du code de l’énergie.

1. L’installation garantit un revenu durable lorsque la moyenne des revenus issus de la vente des productions végétales et animales de l’exploitation agricole après l’implantation de l’installation agrivoltaïque n’est pas inférieure à la moyenne des revenus issus de la vente des productions végétales et animales de l’exploitation agricole avant l’implantation de l’installation.

2. Afin de garantir que la production agricole est l’activité principale, 2 conditions sont requises :

• la superficie non exploitable du fait de l’installation agrivoltaïque n’excède pas 10% de la superficie qu’elle couvre ;

la hauteur de l’installation et l’espacement inter-rangées permettent une exploitation normale et assurent notamment la circulation, la sécurité physique et l’abri des animaux ainsi que, si les parcelles sont mécanisables, le passage des engins.

D’autres textes sont attendus :

• les syndicats d’exploitants agricoles et des producteurs d’énergies renouvelables travaillent sur un projet de loi portant création d’un bail rural à clauses agrivoltaïques ;

un arrêté relatif aux modalités de contrôle et de suivi des installations photovoltaïques devrait également être publié en avril (cf. Bulletin dédié à paraître).

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