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Cour de justice de l’Union européenne – Limitation au droit de propriété – Absence de paiements compensatoires

Dans deux décisions du 27 janvier 2022, la Cour de justice de l’Union européenne a interprété les dispositions du droit de l’Union en matière de paiements compensatoires octroyés au titre de Natura 2000 et a notamment jugé que l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne n’ouvre expressément un droit à indemnisation qu’en cas de privation du droit de propriété.

En effet, dans ces deux décisions, la Cour de justice affirme que : 

« Il convient de relever d’emblée qu’il ressort du libellé de l’article 17 de la Charte que celui-ci n’ouvre expressément un droit à indemnisation qu’en cas de privation du droit de propriété, telle une expropriation (…) ».

Point 60 de la décision n° C-234/20
Point 30 de la décision n° C-238/20

Or, dans sa décision n° C-234/20, la Cour considère que « l’interdiction de procéder à une plantation de canneberges sur un bien relevant du réseau Natura 2000 constitue non pas une privation du droit de propriété de ce bien, mais une restriction à son usage, lequel peut être réglementé par la loi dans la mesure nécessaire à l’intérêt général, conformément à ce que prévoit l’article 17, paragraphe 1, troisième phrase, de la Charte ». Par suite, la Cour juge que l’interdiction de plantation de canneberges sur un bien relevant du réseau Natura 2000 sans compensation financière au bénéfice des propriétaires concernés ne constitue pas « une intervention démesurée et intolérable portant atteinte à la substance même du droit de propriété ». A cet égard, la Cour relève que si les États membres peuvent prévoir d’indemniser les propriétaires, « il ne saurait pour autant être déduit de cette constatation l’existence, en droit de l’Union, d’une obligation d’octroi d’une telle indemnisation ».

Dans sa décision n° C-238/20, la Cour considère, pour des motifs similaires à ceux indiqués dans l’affaire précitée, que « l’article 17 de la Charte doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose à ce que l’indemnisation accordée par un État membre au titre des pertes subies par un opérateur économique en raison des mesures de protection applicables dans une zone du réseau Natura 2000 en vertu de la directive « oiseaux » soit sensiblement inférieure aux dommages réellement encourus par cet opérateur ».

Il convient de noter que la distinction effectuée par la Cour de justice entre privation et restriction du droit de propriété peut être rapprochée de celle réalisée en droit français par le Conseil constitutionnel. En effet, selon le Conseil, lorsque la mesure entraine une limitation et non une privation du droit de propriété, elle n’entre pas dans le champ d’application de l’article 17 de la Déclaration de 1789 prévoyant « la condition d’une juste et préalable indemnité » (Décision n°85-189 DC du 17 juillet 1985). 

CJUE, 27 janvier 2022, n° C-234/20

CJUE, 27 janvier 2022, n° C-238/20

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Olivier Bonneau

Associé-gérant, en charge de la pratique Droit public immobilier & énergie au cabinet

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