bail d'habitation

Question prioritaire de constitutionnalité – Obligation à la charge du bailleur de proposer un relogement lorsqu’il délivre congé à son locataire protégé – Transmission au Conseil constitutionnel (oui)

Par une décision du 30 mars 2023, la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (ci-après « QPC ») portant sur la conformité à la Constitution de l’obligation faite au bailleur, lorsqu’il délivre congé à son locataire âgé de plus de 65 ans et ne disposant que de faibles revenus (dénommé « locataire protégé »), de proposer un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités dans des limites géographiques déterminées. 

En l’espèce, les propriétaires d’un logement donné à bail depuis plusieurs années ont décidé de délivrer congé à leurs locataires afin de récupérer leur logement pour y habiter. À l’occasion du pourvoi qu’ils ont formé contre l’arrêt rendu par la cour d’appel, ils ont sollicité le renvoi au Conseil constitutionnel de la QPC suivante :

L’article 15 III de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, en ce qu’il impose au bailleur personne physique qui justifie d’un motif légitime de reprendre son bien pour l’habiter, de proposer à son locataire âgé de plus de 65 ans et ne disposant que de faibles revenus, un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités dans des limites géographiques déterminées, porte-t-il au droit de propriété consacré à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi, compte tenu de l’impossibilité pour le bailleur, lorsque le bail est ancien et que le logement se situe dans une zone où les loyers sont excessivement élevés, de proposer un tel logement, faute qu’il s’en trouve sur le marché locatif privé ? »

Point n° 3

La Cour de cassation juge que la question est suffisamment sérieuse pour être transmise au Conseil constitutionnel. Pour arriver à cette conclusion, la Cour procède à un raisonnement en deux temps.  

D’abord, elle estime que la disposition contestée porte atteinte aux conditions d’exercice du droit de propriété du bailleur en ce qu’elle lui impose de proposer à son locataire protégé un relogement correspondant à ses besoins et à ses possibilités, dans un périmètre géographique strictement défini. 

Ensuite, elle considère que cette atteinte pourrait être considérée comme disproportionnée, dès lors que l’état du marché locatif dans le secteur concerné est susceptible de rendre impossible la soumission par le bailleur, personne privée, d’une offre de relogement correspondant aux possibilités de locataires dont les ressources sont inférieures au plafond pour l’attribution de logements locatifs conventionnés.

Cour de cassation, 3ème Civ, 30 mars 2023, n° 22-21.76, Bull.

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