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Permis de construire en zone tendue : la suppression de l’appel s’applique dès lors que plus de la moitié d’un programme est destinée à l’habitation

Le Conseil d’Etat considère qu’un bâtiment « dont plus de la moitié de la surface de plancher est destinée à l’habitation » constitue un bâtiment à usage principal d’habitation au sens de l’article R. 811-1-1 du code de justice administrative issu du décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 (CE, 20/03/2017, req. n° 401463, mentionné au recueil Lebon), lequel prévoit la suppression temporaire de l’appel pour les recours contre les permis de construire portant sur un bâtiment à usage principal d’habitation en zone tendue.

Retour sur le dispositif applicable en zone tendue 

La réduction du délai de traitement des recours en matière d’opération de construction de logements

L’article R. 811-1-1 CJA*1, créé par le décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 relatif au contentieux de l’urbanisme, a donné compétence aux tribunaux administratifs pour statuer : 

« en premier et dernier ressort sur les recours contre les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d’habitation ou contre les permis d’aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d’une des communes mentionnées à l’article 232 du CGI*2 et son décret d’application ».

N.B. : Il s’agit des communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants et dans lesquelles existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements.

Les conditions de la suppression de l’appel

Pour appliquer les dispositions de l’article R. 811-1-1 CJA*1, le Conseil d’Etat vérifie les deux conditions cumulatives suivantes : 
 

  • le bâtiment doit être implanté en tout ou partie sur le territoire d’une commune mentionnée à l’article 232 CGI*2 ;
  • la demande doit avoir été introduite devant le tribunal administratif après le 1er décembre 2013

NB. : La dérogation prévue par l’article R. 811-1-1 CJA est temporaire et ne s’applique qu’aux recours introduits entre le 1er décembre 2013 et le 1er décembre 2018. Passée cette date, et sauf prolongation, la possibilité de relever appel sera rétablie pour ces recours.

Une incertitude tranchée concernant la notion d’«usage principal d’habitation»

Le choix d’une interprétation aisément compréhensible de la notion d’ « usage principal d’habitation »

Le Conseil d’Etat, précisant la notion de « bâtiment à usage principal d’habitation », a conduit un raisonnement arithmétique clarifiant le champ d’application de l’article R. 811-1-1 CJA : 

« dans le cas où la construction autorisée est destinée à différents usages, doit être regardé comme un bâtiment à usage principal d’habitation celui dont plus de la moitié de la surface de plancher est destinée à l’habitation » 

(CE, 20/03/2017, n° 401463)

Une clarification s’inscrivant dans un mouvement général d’optimisation du contentieux de l’urbanisme

Associée aux autres moyens de rationalisation du contentieux de l’urbanisme (cristallisation des moyens, annulation partielle etc.), et même si, comme il l’a été rappelé plus haut, sa portée ne sera normalement que temporaire, cette décision confirme, s’il en était besoin, le souci constant du juge administratif de sécuriser et de ne pas retarder les projets immobiliers ayant fait l’objet d’une autorisation administrative. 

Exemples concrets
 

Cas n° 1 :

  • 40 % de surface de plancher à usage d’habitation ;
  • 30 % de commerce ;
  • 30 % de bureau.

Le dispositif est inapplicable.

Cas n° 2 :

  • 51 % de surface de plancher à usage d’habitation ;
  • 49 % de bureau.

Le dispositif s’applique.

Précisions

Le recours exercé contre un refus d’autorisation de construire n’entre pas dans le champ d’application de l’article R. 811-1-1 CJA et peut dès lors faire l’objet d’un appel (CE, 25/11/2015, req.n° 390370).

*1 code de justice administrative

*code général des impôts

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Simon Guirriec

Avocat, intervient en droit de l'urbanisme commercial et dues diligences