Le certificat de projet : un outil aux bénéfices mesurés
Créé à titre expérimental par l’ordonnance n° 2014-356 du 20 mars 2014 relative à l’expérimentation d’un certificat de projet, puis pérennisé par l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale, le certificat de projet codifié aux articles L. 181-5 et suivants du code de l’environnement se distingue du certificat de projet institué à titre expérimental par la loi « climat et résilience » du 22 août 2021 dont les modalités d’application restent à déterminer. En matière d’autorisation environnementale, le certificat de projet permet au pétitionnaire d’identifier les régimes, procédures et décisions nécessaires pour réaliser son projet, en lui offrant un cadrage en amont du dépôt de la demande d’autorisation environnementale et en réduisant les risques d’irrégularité du dossier, dont le montage s’avère souvent complexe (I). Toutefois, son utilité doit être nuancée eu égard à ses effets, somme toute limités (II).
I. UN CADRAGE EN AMONT CLARIFIANT LA PROCÉDURE DE DEMANDE D’AUTORISATION ENVIRONNEMENTALE
L’identification des régimes applicables
Le porteur d’un projet soumis à autorisation environnementale (certains projets immobiliers de grande importance, parc éolien, etc.) peut déposer une demande de certificat de projet auprès du préfet de département, en amont du dépôt de sa demande d’autorisation environnementale (art. L. 181-5 c. env.
et s.).
Dans un délai de deux mois1 et en fonction des informations transmises par le pétitionnaire, le préfet établit un document indiquant :
• les régimes, procédures et décisions relevant de sa compétence, auxquels le projet envisagé est soumis (autorisation de défrichement, DDEP, loi sur l’eau etc.) ;
• les principales étapes de l’instruction et la liste des pièces requises pour chacune d’elles, permettant de s’assurer du caractère complet du dossier ;
• la situation du projet au regard des dispositions relatives à l’archéologie préventive.
De plus, il est loisible au préfet de mentionner les autres régimes, procédure et décisions dont le projet est susceptible de relever ainsi que de transmettre des informations qu’il estime utiles, notamment les éléments de nature juridique ou technique qui pourraient faire obstacle à la réalisation du projet.
La mention obligatoire des délais d’instructions
Outre une vision plus claire des étapes procédurales, le certificat de projet comporte également l’indication des délais d’instruction règlementairement prévus.
A cet égard, le préfet peut fixer un calendrier d’instruction dérogatoire aux délais règlementaires pour les procédures et décisions identifiées, qui engage l’administration et le pétitionnaire, à condition que ce dernier :
• contresigne le calendrier d’instruction ;
• le retourne au préfet dans un délai d’un mois après la notification.
Toutefois, ces calendriers d’instruction dérogatoires ne semblent que très rarement mis en œuvre, le guichet unique instauré par les ordonnances de 2014 et 2017 ayant généré un engorgement des services instructeurs.
La DRIEE Île de France a ainsi constaté en 2020 que la durée globale d’instruction des procédures n’avait pas diminuée, avec une instruction moyenne de 10 mois et 27 jours pour l’autorisation environnementale d’une ICPE2…
II. LA PORTÉE LIMITÉE DU CERTIFICAT DE PROJET POUR LE PÉTITIONNAIRE
Une cristallisation réservée aux friches
Initialement, le certificat de projet mis en place par l’ordonnance du 20 mars 2014 avait pour effet de cristalliser les règles applicables pendant dix-huit mois à l’instar du certificat d’urbanisme.
En ce sens, si une demande d’autorisation environnementale était déposée dans les dix-huit mois suivant la notification du certificat, la règlementation applicable à cette demande était celle en vigueur à la date de la délivrance dudit certificat.
Cet effet cristallisateur ayant été jugé trop complexe à mettre en œuvre3, il n’a pas été repris par l’ordonnance de 2017. Dès lors, une évolution des règles juridiques applicables au projet entre le moment de la délivrance du certificat de projet et celui de la délivrance de l’autorisation environnementale n’est pas à exclure, générant incertitudes et insécurité pour le porteur de projet.
Toutefois, il est intéressant de relever que la loi « climat et résilience » du 22 août 2021 a prévu à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la possibilité pour le porteur d’un projet immobilier intégralement situé sur une friche, sous certaines conditions, de demander un certificat de projet, avec une cristallisation des règles d’urbanisme applicables 4.
Une responsabilité de l’administration limitée
Le certificat de projet revêtant un caractère indicatif et ne préjugeant pas de la délivrance future de l’autorisation environnementale, les informations qu’il contient ne peuvent être invoquées à l’appui d’un éventuel refus ultérieur d’autorisation environ-nementale.
Par ailleurs, si le pétitionnaire n’est pas dépourvu de toute possibilité d’action puisque les informations contenues dans le certificat de projet engagent la responsabilité de l’administration « lorsque leur inexactitude ou la méconnaissance des engagements du calendrier a porté préjudice au bénéficiaire du certificat » (art. L. 181-6 c. env.) ce recours semble également limité puisque ces informations dépendent de celles transmises par le pétitionnaire.
Conseil opérationnel : le caractère complet du certificat de projet étant subordonné aux informations transmises par le pétitionnaire lors de la demande du certificat de projet
(art. L. 181-6 du code de l’env.), il convient de fournir des informations précises et détaillées afin d’optimiser les bénéfices conférés par le certificat de projet.
Quelques précisions
1 Le délai de deux mois court à compter de l’accusé de réception du dossier complet de la demande. Il peut être prolongé d’un mois par le préfet qui en informe le demandeur et motive cette prolongation.
2 Cf. la charte d’engagement entre la DRIEE Île-de-France et les bureaux d’études publiée par la DRIEE en septembre 2020 pour instruire plus vite les dossiers de demande d’autorisation environnementale.
3 Rapport ministériel de décembre 2015 sur l’évaluation des expérimentations de simplification en faveur des entreprises dans le domaine environnemental.
4 Article 212 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « loi climat et résilience ») pour lequel un décret en Conseil d’État définissant les modalités d’application était initialement prévu en janvier 2022.
Les tiers peuvent-ils contester un certificat de projet ? (non)
Dans une décision du 27 décembre 2018, n° 17BX00034, la CAA de Bordeaux a jugé que les tiers ne disposaient pas d’un intérêt à agir à l’encontre d’un certificat de projet. Eu égard aux effets qu’il produit, les informations qu’il contient n’affectent que le porteur de projet.
Abréviations
CAA : cour administrative d’appel
DDEP : dérogation à l’interdiction de destruction des espèces protégées et de leurs habitats
DRIEE: Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie
ICPE: installation classée pour la protection de l’environnement