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Identité des formations de jugement – Sursis à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation d’urbanisme – Décision au fond – Régularité – Portée article L. 122-9 code de l’urbanisme – Espèces animales caractéristiques de la montagne

Dans un arrêt du 17 janvier 2024 (n° 462638), le Conseil d’Etat est venu apporter des précisions sur la portée de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme et la composition de la formation de jugement qui se prononce à la fois sur l’opportunité d’une régularisation d’un permis de construire permise par les dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et sur l’issue du litige.

En l’espèce, l’association Bien vivre en pays d’Urfé s’est pourvue en cassation contre deux arrêts rendus par la Cour d’appel de Lyon les 3 juin 2021 et 26 janvier 2022 par lesquels elle avait :

  • d’une part, en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, sursis à statuer sur l’appel interjeté par l’association et enjoint à la société pétitionnaire, la société Monts de la Madeleine Energie, de justifier d’une mesure de régularisation des permis de construire litigieux, tendant à l’examen par le préfet du respect, par les projets de parcs éoliens en cause, des dispositions générales du code de l’urbanisme relatives à l’aménagement et à la protection de la montagne ;
  • d’autre part, jugé que les permis modificatifs délivrés par le préfet avaient régularisé le vice entachant les permis initiaux et, en conséquence, rejeté la requête d’appel.

Premièrement, l’association se prévalait de la méconnaissance de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme qui prévoit que dans les espaces, milieux et paysages caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard, les documents et décisions relatifs à l’occupation des sols doivent être compatibles avec les exigences de préservation de ces espaces. Pour satisfaire à cette exigence de compatibilité, ces documents et décisions doivent comporter des dispositions de nature à concilier l’occupation du sol projetée et les aménagements s’y rapportant avec l’exigence de préservation de l’environnement montagnard prévue par la loi. 

Sur ce moyen, la cour a considéré que ces dispositions permettent, à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir contre les documents et décisions relatifs à l’occupation des sols en zone de montagne, de contester l’atteinte que l’un des projets énumérés à l’article L. 122-2 du code de l’urbanisme porterait aux milieux montagnards et donc aux habitats naturels qui s’y trouveraient. Cependant, elle juge que ces dispositions n’ont pas pour objet de protéger les espèces animales caractéristiques des montagnes.

Deuxièmement, la régularité de l’arrêt était contestée au motif que la formation de jugement qui a sursis à statuer en vue de la régularisation des permis de construire querellés était la même que celle qui a admis ladite régularisation et statué au fond en rejetant l’appel formé par l’association requérante. Sur ce point, le Conseil d’Etat a jugé qu’une même formation de jugement pouvait à la fois surseoir à statuer par une décision avant dire droit dans l’attente d’une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, et statué définitivement sur le même litige, aucun texte ni principe général du droit (PGD) imposant que la formation de jugement soit différente dans ces hypothèses.

Conseil d’État, 17 janvier 2024, n°462638, Association Bien vivre en pays d’Urfé, Tab. Leb.

3. Sans préjudice des autres règles relatives à la protection des espaces montagnards, les dispositions de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme prévoient que dans les espaces, milieux et paysages caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard, les documents et décisions relatifs à l’occupation des sols doivent être compatibles avec les exigences de préservation de ces espaces. Pour satisfaire à cette exigence de compatibilité, ces documents et décisions doivent comporter des dispositions de nature à concilier l’occupation du sol projetée et les aménagements s’y rapportant avec l’exigence de préservation de l’environnement montagnard prévue par la loi. Si ces dispositions permettent, à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir contre les documents et décisions relatifs à l’occupation des sols en zone de montagne, de contester utilement l’atteinte que causerait l’un des projets énumérés à l’article L. 122-2 précité du code de l’urbanisme aux milieux montagnards et, par suite, aux habitats naturels qui s’y trouvent situés, il résulte de leurs termes mêmes qu’elles n’ont en revanche pas pour objet de prévenir les risques que le projet faisant l’objet de la décision relative à l’occupation des sols serait susceptible de causer à une espèce animale caractéristique de la montagne.

(…)

6. Il ne résulte d’aucun texte ni d’aucun principe général du droit que la composition d’une formation de jugement statuant définitivement sur un litige doive être distincte de celle ayant décidé, dans le cadre de ce même litige, de surseoir à statuer par une décision avant-dire droit dans l’attente d’une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que l’arrêt attaqué aurait méconnu le principe d’impartialité pour avoir été rendu par la même formation de jugement que celle qui avait rendu l’arrêt avant-dire droit du 3 juin 2021 et serait, pour ce motif, entaché d’irrégularité ne peut qu’être écarté.

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