Dérogation « espèces protégées » – Application de l’avis contentieux du 9 décembre 2022 – Parc éolien – Risque suffisamment caractérisé (non) – DDEP (non)
Par un arrêt du 17 février 2023, le Conseil d’État se livre lui-même à la première application contentieuse de son avis du 9 décembre 2022 par lequel il a fixé les conditions déclenchant l’obligation de déposer la demande de dérogation « espèces protégées » prévue par les dispositions de l’article L.411-2 du code de l’environnement.
Plusieurs requérants, dont une association de protection de l’environnement et une société d’économie mixte immobilière, avaient demandé l’annulation de l’autorisation environnementale portant sur un parc de 7 éoliennes, au motif, notamment, de l’absence de dérogation espèces protégées relative à deux espèces : la Grue cendrée et le Milan royal.
La cour administrative d’appel de Nancy (CAA Nancy, 25 novembre 2021, n° 19NC01845) avait considéré qu’une dérogation espèces protégées n’était pas nécessaire, après avoir relevé, s’agissant d’abord de la Grue cendrée, que :
- si une étude complémentaire menée à la demande du pétitionnaire en 2014 avait mis en évidence la présence sensiblement plus importante de spécimens de Grues cendrées que l’étude d’impact initialement établie, aucune zone de nidification n’avait été identifiée ;
- le risque estimé de modification des trajectoires de migration lié au projet était faible à modéré ;
- le risque de collision était non significatif, au regard de l’altitude de vol de l’espèce et des conditions d’implantation des éoliennes.
S’agissant ensuite du Milan royal, qui soulève un fort enjeu de conservation eu égard à son statut de conservation défavorable au niveau national, la cour avait relevé que :
- aucune zone de nidification n’avait été identifiée sur le site ;
- l’impact sur l’espèce n’était pas démontré.
Le Conseil d’État considère qu’en jugeant que « le projet n’impliquait pas d’atteinte suffisamment caractérisée à la grue cendrée et au milan royal, et en déduisant qu’un tel risque ne nécessitait pas de former préalablement une demande de dérogation [espèces protégées] », la cour n’a commis ni d’erreur de droit, ni donné aux faits de l’espèce une inexacte qualification juridique.
CE, 17 février 2023, Association de défense de l’environnement à Tiercelet, n° 460798
crédit image https://www.gironde-tourisme.fr/les-grues-cendrees-en-gironde/