Droit de l'énergieDroit de l'environnement

Complément de rémunération – Energies renouvelables – Plafonnement du reversement de la prime – Hausse des prix de l’électricité

Par une décision n° 2023-1065 QPC en date du 26 octobre 2023, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les dispositions de l’article 38 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 modifiant les modalités de reversement par les producteurs de la prime négative à EDF lorsque le prix du marché dépasse le tarif de référence fixé par le contrat de complément de rémunération.

Pour rappel, en application des dispositions des articles L. 311-12 et L. 314-18 du code de l’énergie, les exploitants de certaines installations de production d’énergie renouvelable peuvent bénéficier d’un contrat offrant un complément de rémunération conclu avec EDF dont le fonctionnement peut être résumé ainsi :

  • lorsque le prix du marché auquel les producteurs vendent leur production est inférieur à un tarif de référence fixé par le contrat ou par arrêté, EDF verse une prime – un complément de rémunération – aux producteurs ;
  • lorsque le tarif de référence est inférieur au prix du marché, les producteurs reversent à EDF le montant correspondant à la différence entre ces deux prix, sous la forme d’une prime négative. Néanmoins, l’article R. 314-49 du code de l’énergie, dans sa rédaction initiale, prévoyait un plafonnement du reversement de la prime négative à hauteur du montant total des aides reçues depuis le début du contrat au titre du complément de rémunération. De ce fait, en cas de hausse importante du prix du marché, les producteurs étaient susceptibles de bénéficier d’une rente conséquente.

Aux termes des dispositions censurées par le Conseil constitutionnel, à compter du 1er janvier 2022, le reversement des sommes dues par le producteur à EDF, lorsque le prix de marché de l’électricité dépasse un tarif de référence, ne devait plus être plafonné au montant total des aides perçues au titre du complément de rémunération par le producteur. Le reversement devait alors être calculé en fonction d’un prix seuil déterminé, chaque année jusqu’à la fin du contrat, par arrêté conjoint des ministres chargés de l’énergie et du budget.

Les dispositions litigieuses n’ont toutefois pas été censurées en raison de leur atteinte au droit au maintien des conventions légalement conclues. En effet, le Conseil constitutionnel a estimé qu’en adoptant les dispositions contestées dans un contexte de forte hausse des prix de l’électricité, le législateur a justifié l’atteinte portée au droit au maintien des convention légalement conclues en poursuivant un objectif d’intérêt général, en l’occurence la correction des effets d’aubaine dont ont bénéficié les producteurs qui ont reçu un soutien public, et ce, afin d’atténuer l’effet préjudiciable de cette hausse pour le consommateur final. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a relevé que si les dispositions contestées affectent un élément essentiel des contrats de complément de rémunération, il résulte de l’article L. 314-20 du code de l’énergie que, quelle que soit l’évolution des prix du marché, une rémunération raisonnable des capitaux immobilisés tenant compte des risques inhérents à leur exploitation jusqu’à l’échéance de leur contrat leur est garantie. Le Conseil constitutionnel a ainsi validé le principe d’un déplafonnement de la prime négative devant être versée par les producteurs à EDF, de manière rétroactive.

La censure du Conseil constitutionnel repose sur la circonstance que les dispositions censurées renvoient à un arrêté ministériel pour fixer un prix seuil en fonction duquel seraient calculés les reversements dus par les producteurs, ce qui constitue une situation d’incompétence négative :

16. Toutefois, ces dispositions se bornent à renvoyer à un arrêté ministériel la fixation d’un prix seuil en fonction duquel sont calculés les reversements dus par les producteurs bénéficiant d’un complément de rémunération au titre des contrats en cours d’exécution. En s’abstenant de définir lui-même les critères de détermination de ce prix, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant le droit au maintien des conventions légalement conclues.

17. Dès lors, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, les dispositions contestées doivent être déclarées contraires à la Constitution.

Décision n° 2023-1065 QPC du 26 octobre 2023, Association France énergie éolienne et autres

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