Droit de l'énergieDroit de l'environnementMéthanisation

Unité de méthanisation – Capacités financières – Description insuffisante – Sursis à statuer – Régularisation (oui)

Un jugement rendu le 16 janvier 2024 par le tribunal administratif de Nantes (n° 2207634) a confirmé la nécessité de définir précisément, dans le dossier de demande d’enregistrement d’une unité de méthanisation, les modalités selon lesquelles le pétitionnaire entend disposer de capacités financières. A défaut, le pétitionnaire s’expose à ce que sa demande fasse l’objet d’un arrêté de régularisation, retardant la mise en oeuvre de son projet.

En droit, le tribunal administratif de Nantes a d’abord rappelé que si l’article L. 512-7-3 du code de l’environnement dispose qu’un dossier de demande d’enregistrement n’a plus à comporter des indications précises et étayées sur les capacités techniques et financières de l’exploitante, le dossier de demande d’enregistrement doit néanmoins comporter une présentation des capacités que le demandeur entend mettre en œuvre, si celles-ci ne sont pas encore constituées.

Il a ensuite rappelé que, lorsque le juge se prononce sur la légalité de l’enregistrement avant la mise en service de l’installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l’ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l’exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement.

En l’espèce, le tribunal administratif de Nantes a analysé la pertinence des modalités (i) de financement bancaire et (ii) d’investissement en fonds propres, prévues par le pétitionnaire pour justifier des capacités financières.

En ce qui concerne le financement bancaire, le tribunal a jugé que la demande d’enregistrement justifie, compte tenu de la lettre d’intention d’une banque, de la pertinence des modalités selon lesquelles la société Méthalande prévoit de disposer des capacités financières adéquates (i.e. accord de principe pour un emprunt bancaire sur 15 ans correspondant à un financement partiel couvrant un investissement jusqu’à 6 300 000 euros sous réserve d’un apport en propre de 25 à 30%).

En revanche, en ce qui concerne l’investissement en fonds propre, il a estimé que le dossier de demande d’enregistrement ne chiffre pas la part du montant de l’apport en fonds propres de la société, susceptible de varier entre 1,575 et 1,9 millions d’euros et qu’il ne comporte aucune indication sur les modalités de constitution de cet apport en propre, dont ni l’origine ni la nature ni les proportions ne sont déclarées. 

A défaut pour le public d’avoir disposé d’un dossier comportant une description suffisante des modalités prévues pour constituer les capacités financières dont le pétitionnaire serait en mesure de disposer à la mise en service de l’installation, cette insuffisance a eu pour effet de nuire à la complète information de celui-ci. Le tribunal a jugé que le requérant était ainsi fondé à soutenir que la décision attaquée est intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière. Et ce, nonobstant la circonstance que l’autorité administrative compétente ait reçu, postérieurement à l’autorisation attaquée, des éléments justifiant la constitution effective des capacités financières qui manquaient au dossier de demande d’enregistrement initialement déposé puis soumis à la consultation du public. Cette transmission ne remédie en rien à l’insuffisance d’information du public.

Faisant application des principes énoncés dans l’avis du Conseil d’Etat du 10 novembre 2023, Association Limousin nature environnement et autres, n° 474431, le tribunal administratif de Nantes a sursis à statuer pour permettre à l’exploitant de régulariser cette insuffisance par la mise à disposition du préfet et du public de la présentation complète des modalités selon lesquelles il entend constituer ses capacités financières pour les établir au plus tard à la mise en service de l’installation. Le public pourra présenter des observations sur ces éléments. Il appartiendra ensuite au préfet de la Loire-Atlantique, le cas échéant, au vu de l’ensemble de ces éléments, de délivrer à l’exploitant un arrêté de régularisation. Le délai de régularisation de l’arrêté attaqué a été fixé, par le tribunal administratif de Nantes, à quatre mois à compter de la notification du jugement.

TA Nantes, 16 janvier 2024, n°2207634

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