Recours Tarn-et-Garonne – « tiers lésé » – membre du conseil d’administration d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (non)
Pour rappel, le Conseil d’Etat a par sa jurisprudence dite « Tarn-et-Garonne » ouvert le recours en contestation de la validité d’un contrat public à « tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses » (CE, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, req. n° 358994).
Par un arrêt du 2 décembre 2022, le Conseil d’Etat est venu préciser les contours de la notion de tiers susceptibles d’être lésés.
Dans cette affaire, un enseignant à l’ENS de Lyon avait demandé au tribunal administratif de Lyon d’annuler le contrat de partenariat conclu le 18 avril 2018, entre l’Université de Lyon et la société Neolys dans le cadre du » projet Lyon campus » et portant sur la réhabilitation des bâtiments abritant l’Ecole normale supérieure de Lyon (ENS). En tant que membre élu du conseil d’administration de l’ENS, le requérant estimait pouvoir bénéficier de la qualité de « tiers privilégié », et être ainsi recevable à agir.
Le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête et l’appel interjeté à l’encontre du jugement a également fait l’objet d’un rejet par la cour administrative d’appel de Lyon.
Le Conseil d’Etat saisi d’un pourvoi en cassation a jugé dans l’arrêt commenté, qu’outre le préfet, seuls ont la qualité de « tiers privilégié » les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné par le contrat, de sorte qu’ un membre du conseil d’administration d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPCSCP) au sens de l’article L. 711-1 du code de l’éducation, agissant en cette qualité, ne peut être regardé comme disposant de cette faculté.
Partant, la Haute Juridiction déclare irrecevable le recours introduit tendant à contester la validité de la conclusion du contrat de partenariat public-privé (PPP).
Cet arrêt s’inscrit dans le mouvement jurisprudentiel d’interprétation stricte de la notion de « tiers lésés », tendant à préserver la stabilité des relations contractuelles et les intérêts du cocontractant de l’administration (cf. par exemple en ce sens : CE 3 juin 2020, Département de la Loire-Atlantique, req. n° 426932 ; CE 20 juillet 2021, req. n° 443346 : les ordres professionnels qui se prévalent des intérêts collectifs dont ils ont la charge ne sont pas recevables à former un recours tendant à l’annulation de contrats publics).
CE 2 décembre 2022, n°454323, Tab. Leb.