BulletinsDroit de l'urbanisme

Le décret n° 2023-1096 du 27 novembre 2023 relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols modifie la nomenclature des  surfaces artificialisées et non artificialisées

Pour rappel, la loi no 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi « Climat et résilience ») a fixé l’objectif d’atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » (ci-après ZAN) en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (ci-après « ENAF ») dans les dix prochaines années. Cette trajectoire progressive est à décliner territorialement dans les documents de planification et d’urbanisme.

Ce décret n° 2023-1096 du 27 novembre 2023 complète et rectifie le précédent décret n° 2022-763 du 29 avril 20211 s’agissant de la nomenclature des espaces artificialisés et non artificialisés, annexée à l’article R. 101-1 du code de l’urbanisme. A compter de 2031, cette nomenclature permettra à l’ensemble des territoires de comptabiliser, avec la même méthode, l’enveloppe des espaces artificialisés restant à consommer jusqu’en 2050, ainsi que de traduire les objectifs de réduction de l’artificialisation au sein des documents de planification (SRADDET, SCoT, PLUi, PLU, carte communale).

I.Les catégories de la nomenclature des surfaces artificialisées/non artificialisées modifiées par le décret

Les surfaces artificialisées

Le décret classe dans la catégorie des surfaces artificialisées, les surfaces ci-après reproduites.

(1) les surfaces dont les sols sont imperméabilisés en raison du bâti (constructions, aménagements, ouvrages ou installations) ;

(2) les surfaces dont les sols sont imperméabilisés en raison d’un revêtement (artificiel, asphalté, bétonné, couvert de pavés ou de dalles) ;

(3) les surfaces partiellement ou totalement perméables dont les sols sont stabilisés et compactés ou recouverts de matériaux minéraux, ou dont les sols sont constitués de matériaux composites (couverture hétérogène et artificielle avec un mélange de matériaux non minéraux) ;

(4) les surfaces à usage résidentiel, de production secondaire ou tertiaire, ou d’infrastructures notamment de transport ou de logistique, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée 2 ;

(5) les surfaces entrant dans les catégories 1° à 4°, qui sont en chantier ou en état d’abandon.

Les surfaces non artificialisées

Le décret classe dans la catégorie des surfaces non-artificialisée, les surfaces ci-après reproduites.

(6) les surfaces naturelles dont les sols sont soit nus (sable, galets, rochers, pierres ou tout autre matériau minéral, y compris les surfaces d’activités extractives de matériaux en exploitation) soit couverts en permanence d’eau, de neige ou de glace ;

(7) les surfaces à usage de cultures dont les sols sont soit arables ou végétalisés (agriculture), y compris si ces surfaces sont en friche, soit recouverts d’eau (pêche, aquaculture, saliculture) ;

(8) les surfaces dont les sols sont végétalisés et à usage sylvicole ;

(9) les surfaces dont les sols sont végétalisés et qui constituent un habitat naturel ;

(10) les surfaces dont les sols sont végétalisés et qui n’entrent pas dans les catégories précédentes.

Sous certaines conditions, les surfaces végétalisées accueillant des installations de panneaux photovoltaïques 3 ou à usage de parc ou de jardin public 4 (cf. nouv. art. R 101-1 III° CU) seront considérées comme non artificialisées.

II. Les conditions d’application de la nomenclature précisées par le décret

Les seuils (enfin) définis par le décret

L’occupation effective du sol est mesurée à l’échelle de polygones (cf. nouv. art. R. 101-1 II° du c. de l’urb.) dont la surface est définie en fonction de seuils de référence suivants :

–  50 m2 pour le bâti ;

– 2 500 m2 pour les autres catégories de surfaces.

Le décret précise qu’il convient de prendre en compte « l’occupation effective du sol observée », et non pas les zones ou secteurs délimités par les documents de planification et d’urbanisme  (cf. nouv. art. R. 101-1 II° du CU).

La nomenclature, conjuguée aux seuils ainsi définis, permettra d’établir, à compter de 2031, une méthode uniforme de comptabilisation de l’artificialisation des sols sur l’ensemble du territoire national, ce qui devrait améliorer la sécurisation juridique des documents de planification.

Une plateforme nationale pour l’accès dématérialisé aux données sur l’artificialisation des sols

Le nouvel article R. 101-2 du code de l’urbanisme (créé par l’article 1er du décret) précise que l’observatoire de l’artificialisation est, pour l’ensemble du territoire, la plateforme nationale pour l’accès dématérialisé aux données sur la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers et sur l’artificialisation des sols, qui sont mises à disposition par l’Etat notamment afin de permettre la fixation et le suivi des objectifs prévus dans les documents de planification et d’urbanisme.

En outre, l’article 3 du décret précise le contenu du rapport relatif à l’artificialisation des sols, prévu à l’article L. 2231-1 du CGCT, qui doit être établi tous les trois ans par les maires des communes et les présidents d’EPCI dotés d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale.  Ce rapport  présentera le rythme d’artificialisation sur le territoire et rendra compte de l’atteinte des objectifs fixés en termes de réduction de l’artificialisation.  Le décret apporte des précisions sur les indicateurs et les données à y faire figurer (cf. nouvel art. R. 2231-1 du CGCT) 5.

Quelques précisions

1 Ce décret a été partiellement censuré par le Conseil d’Etat (cf. CE, 4 octobre 2023, n° 465341, Rec. Leb).

2 Une surface végétalisée est qualifiée d’herbacée dès lors que moins de 25% du couvert végétal est arboré.

3 Les surfaces végétalisées sur lesquelles sont implantées des installations de production d’énergie solaire photovoltaïque pourront être qualifiées, en fonction de leurs usages, de surfaces non-artificialisées relevant des catégories 6°, 7° ou 10°, à condition de respecter :

– les critères de l’agrivoltaïsme (cf. art. L. 111-27 CU) qui sont en cours de définition par le projet de décret relatif au développement de l’agrivoltaïsme et aux conditions d’implantation des installation photovoltaïques sur terrains agricoles, naturels ou forestiers. 

– et/ou les critères des installations photovoltaïques dites « compatibles », lesquelles ne pourront s’implanter qu’au sein des périmètres identifiés par les futurs documents cadres établis par le préfet de département (cf. art. L.111-29 CU), selon les critères définis par le projet de décret susvisé.

4 Les surfaces végétalisées à usage de parc ou de jardin public, pourront être qualifiées de surfaces non-artificialisées relevant des catégories 9° ou 10°  à partir des mêmes seuils de référence applicables.

5 A titre d’exemple, ce rapport pourra indiquer la consommation d’ENAF ou d’artificialisation des sols, les surfaces rendues « imperméables », l’atteinte des objectifs de réduction fixés dans les documents de planification, ou d’autres indicateurs et données choisis librement.

Abréviations

ZAN : zéro artificialisation nette

ENAF : espaces naturels agricoles et forestiers

CGCT : code général des collectivités territoriales

EPCI : établissement public  de coopération intercommunale

CU : code de l’urbanisme

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