Droit de préemption urbain – Déclaration d’intention d’aliéner transmise par une personne qui n’est pas le propriétaire – Illégalité de la décision de préemption
Par une décision datée du 1er mars 2023, le Conseil d’État juge qu’est illégale la décision de préemption prise alors que la déclaration d’intention d’aliéner le bien qui en fait l’objet a été transmise par une personne qui n’en est pas le propriétaire.
Ce principe doit ainsi s’accorder avec le principe selon lequel, la réception d’une nouvelle DIA ouvre au titulaire du droit une nouvelle faculté de décider de préempter le bien. Cette faculté n’est ouverte qu’à condition que la première DIA n’ait pas mené à la vente parfaite du bien (CE, 5 juillet 2013, M. Loire, n°349664) :
Il résulte de ces dispositions, en premier lieu, que le titulaire du droit de préemption sur un bien ne saurait légalement l’exercer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si la déclaration d’intention de l’aliéner a été faite par une personne qui, à la date de cette déclaration, n’est pas propriétaire du bien. Il en résulte, en second lieu, que la réception d’une déclaration d’intention d’aliéner ouvre au titulaire du droit de préemption, alors même qu’il aurait renoncé à l’exercer à la réception d’une précédente déclaration d’intention d’aliéner portant sur la vente du même bien par la même personne aux mêmes conditions, un délai de deux mois pour exercer ce droit. La circonstance que la déclaration d’intention d’aliéner soit incomplète ou entachée d’une erreur substantielle portant sur la consistance du bien objet de la vente, son prix ou sur les conditions de son aliénation est, par elle-même, et hors le cas de fraude, sans incidence sur la légalité de la décision de préemption prise à la suite de cette déclaration.
Au cas d’espèce, saisi d’un pourvoi contre l’ordonnance par laquelle le tribunal administratif de la Guyane a refusé de suspendre une décision de préemption, le Conseil d’État constate que la déclaration d’intention d’aliéner le bien, objet de ladite décision, n’a pas été déposée par celui qui en était désormais le propriétaire. Dans ces circonstances, la décision de préemption contestée présentait un doute sérieux quant à sa légalité :
En l’espèce, la réception d’une déclaration d’intention d’aliéner le 24 août 2021 ouvrait ainsi en principe à la commune de Rémire-Montjoly, autorité titulaire du droit de préemption urbain, la possibilité d’exercer légalement ce droit, alors même qu’elle avait renoncé à l’exercer à la réception d’une précédente déclaration d’intention d’aliéner portant sur la vente du même bien par la même personne aux mêmes conditions. Il résulte toutefois de l’instruction qu’à la date de cette déclaration, faite par la collectivité territoriale de Guyane, la vente réalisée auparavant au profit de M. B… avait été jugée parfaite par le tribunal judiciaire de Cayenne. Si, en l’état de l’instruction, il n’est pas établi que ce jugement soit devenu définitif, le moyen tiré de ce que la déclaration d’intention d’aliéner n’émanait pas du propriétaire du bien préempté est par suite propre, en l’état de l’instruction et eu égard à l’office du juge des référés, à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
CE, 1er mars 2023, Commune de Rémire-Montjoly, n°462877, Tab. Leb.