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Autorisation d’exploiter un parc éolien – Sursis à exécution – Régularisation d’une autorisation – Dérogation d’espèces protégées

Dans un arrêt rendu le 21 mars 2023 (req. n° 20BX00331 et 20BX01834), la cour administrative d’appel de Bordeaux a sursis à statuer sur les conclusions de requêtes jusqu’à l’expiration d’un délai de quatre mois, afin de permettre à un développeur de projet éolien de procéder à la régularisation de l’autorisation d’installer et d’exploiter un parc éolien qui lui a été octroyée, par l’obtention d’une dérogation au titre de l’article L. 411-2 du code de l’environnement (i.e. notamment la dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées).

Saisi d’un pourvoi formé par le développeur éolien, le Conseil d’Etat a jugé dans un arrêt rendu le 3 octobre 2023 (req. n° 474381) que les conditions – définies à l’article R. 821-5 du code de justice administrative – pour qu’il soit sursis à l’exécution de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux étaient, en l’espèce remplies, et ce, à deux égards.

D’une part, selon le Conseil d’Etat, l’exécution de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux risquerait d’entraîner des conséquences difficilement réparables pour la société requérante. Outre les conséquences financières engendrées par le retard induit sur la réalisation du projet éolien litigieux, le Conseil d’Etat souligne que l’exécution de la mesure de régularisation prescrite serait de nature à priver d’objet un recours contre l’arrêt de la cour administrative d’appel contestant le bien-fondé de l’illégalité ayant justifié ladite mesure. En effet, dans ce cas, le pétitionnaire est placé face à un choix binaire entre l’exécution de la mesure de régularisation sans pouvoir contester l’illégalité du vice retenu ou le refus d’exécuter la mesure de régularisation dans le délai fixé par le juge, au risque d’encourir l’annulation de l’autorisation dont il bénéficie.

D’autre part, le Conseil d’Etat juge que, en l’espèce, le moyen tiré de ce que la cour administrative d’appel a commis un erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits, en jugeant que le projet litigieux nécessiterait l’octroi d’une dérogation espèces protégées, parait, en l’état de l’instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l’annulation de l’arrêt attaqué, l’infirmation de la solution retenue par les juges du fond.

3. D’une part, l’exécution de l’arrêt de la cour administrative d’appel est susceptible d’entraîner un retard estimé entre un an et deux ans pour la réalisation du projet éolien de la société Ferme éolienne de Bandiat-Tardoire, de nature à générer un surcoût évalué entre 1,8 et 3,6 millions d’euros. En outre, l’exécution de la mesure de régularisation prescrite par l’arrêt contesté est de nature à priver d’objet un recours contre cet arrêt contestant le bien-fondé de l’illégalité ayant justifié cette mesure. Par suite, dans les circonstances de l’espèce, l’exécution de cet arrêt risquerait d’entraîner des conséquences difficilement réparables pour la requérante.

4. D’autre part, le moyen tiré de ce que la cour a commis une erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que le projet litigieux nécessitait l’octroi d’une dérogation dite  » espèces protégées « , paraît, en l’état de l’instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l’annulation de l’arrêt attaqué, l’infirmation de la solution retenue par les juges du fond.

5. Dans ces conditions, il y a lieu d’ordonner le sursis à exécution de l’arrêt du 21 mars 2023 de la cour administrative d’appel de Bordeaux.

CE, 3 octobre 2023, Société Ferme éolienne de Bandiat-Tardoire, n° 474381

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