Que reste-t-il de l’obligation d’organiser un concours préalablement à l’attribution des marchés publics de maîtrise d’œuvre ?
Considérée comme salutaire par certains, ou trop coûteuse et complexe par d’autres acheteurs, l’obligation d’organiser un concours préalablement à l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre a fait l’objet de vifs débats ces dernières années, en particulier en ce qui concerne les acteurs du logement social, d’une part, et le corps des architectes, d’autre part. Les récentes évolutions de la loi « ELAN » nous offrent l’occasion de revenir sur le droit applicable en la matière, notamment en ce qui concerne les acteurs du logement social pour lesquels le choix de la procédure applicable est désormais plus ouvert.
I. L’organisation d’un concours par les acheteurs classiquement soumis à la loi MOP
Le principe
Les dispositions de l’actuel article 90 du décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics, comme celles du futur article R. 2172-2 du code de la commande publique (CCP), obligent l’ensemble des acteurs publics à organiser un concours préalablement à l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre.
Encore faut-il évidemment que la valeur du marché excède les seuils à partir desquels les procédures formalisées s’appliquent.
Sont expressément visés par cette obligation tous les acheteurs soumis à la loi « MOP » du 12 juillet 1985, tels qu’énumérés à son article premier (codifié au futur art. L. 2411-1, CCP).
Les autres acheteurs, et notamment les SEM, SPL, GIE, relèvent des procédures classiques applicables selon le montant du marché.
Les exceptions courantes
Malgré leur soumission aux dispositions de la loi MOP, et du futur CCP, les acheteurs pourront s’abstenir d’organiser une procédure de concours lorsque le marché de maîtrise d’œuvre (Cf. art. 90 décret n° 2016-360, R. 2172-2 CCP) :• est relatif à la réutilisation ou à la réhabilitation d’ouvrages existants, ou à la réalisation d’un projet urbain ou paysager ;• est relatif à des ouvrages réalisés à titre de recherche, d’essai ou d’expérimentation ;• est relatif à des ouvrages d’infrastructures ;• ne confie aucune mission de conception au titulaire.
Selon la valeur de ces marchés, les pouvoirs adjudicateurs pourront ainsi recourir à la procédure adaptée, l’appel d’offres, la procédure avec négociation ou encore le dialogue compétitif.
II. Les règles dérogatoires applicables aux acteurs du logement social
L’exception générale accordée aux organismes d’HLM et aux CROUS
Alors qu’ils étaient exclus du respect de l’obligation d’organiser un concours par la loi ELAN, le code de la commande publique tel que publié initialement (ord. n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 ; décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018) ne reprenait pas cette exception et les soumettait de nouveau à une telle procédure.
Par un décret n° 2018-1225 du 24 décembre 2018, le CCP a été modifié pour conforter ces organismes et les exclure de l’organisation d’un tel concours.
Les organismes d’habitations à loyer modéré, qu’ils soient publics ou privés (art. L. 411-2, CCH), ainsi que les CROUS (art. L. 822-3, code de l’éducation), n’ont ainsi plus à organiser de concours pour la passation de l’ensemble de leurs marchés publics de maîtrise d’œuvre ayant pour objet la réalisation d’un ouvrage de bâtiment.
Le cas particulier des sociétés d’économie mixte
Ces mêmes dispositions de la loi ELAN ont exclu de l’obligation de concours les SEM de construction et de gestion de logements sociaux agréées au sens de l’article L. 481-1 du CCH.
Cependant, contrairement aux organismes d’HLM et aux CROUS, ces SEM ne bénéficient pas de cette exclusion pour tout ouvrage de bâtiment mais uniquement pour ce qui relève « de leur activité agréée » (art. 5-1, loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture ; art. R. 2172-2, CCP).
Il en résulte ainsi que seuls les marchés publics de maîtrise d’œuvre ayant pour objet la réalisation de logements sociaux, de résidences universitaires et d’immeubles à usage d’habitation destinés à certains fonctionnaires pourront être passés selon une procédure alternative.
A noter
Outre ces exceptions à l’obligation de concours que la loi ELAN a offertes aux acteurs publics et privés concourant à la production de logement social, d’importantes souplesses ont également été introduites, en ce domaine, s’agissant des règles relatives à la maîtrise d’ouvrage publique et de ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée :• les OPHLM, qui étaient soumis à l’entière loi MOP, ne sont désormais astreints qu’au respect de son titre Ier et ce, uniquement lorsqu’ils réalisent des logements locatifs sociaux ; • les organismes privés d’HLM et les SEM ne sont soumis qu’au respect du titre I de la loi MOP lorsqu’ils réalisent des logements locatifs sociaux .