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Occupation du domaine privé – Absence d’obligation de mise en concurrence (oui) – Vigilance recommandée (oui)

Dans une réponse ministérielle récente à une question écrite du Sénat, le gouvernement est revenu sur la question sensible de l’obligation, ou non, de mise en concurrence des titres d’occupation du domaine privé des personnes publiques.

Revenons sur l’historique de cette question épineuse.

Par un arrêt du 14 juillet 2016 (Promoimpresa, aff. C-458/14 et C-67/15), la CJUE a posé le principe selon lequel la délivrance de titres d’occupation permettant l’exploitation d’une activité économique doit faire l’objet d’une procédure de sélection préalable, indépendamment de sa domanialité publique ou privée, dès lors que :

  • l’octroi constitue un régime au sens de la directive Services (article 4, point 6) ;
  • les autorisations présentent un caractère limité en raison de la rareté des ressources disponibles ;

L’ordonnance n°2017-562 du 19 avril 2017, aujourd’hui codifiée aux articles L. 2122-1 et suivants du CG3P, a expressément soumis la délivrance  des titres d’occupation du domaine public, dans le respect des principes de transparence, d’impartialité et de publicité. La question restait donc posée pour le domaine privé.

Dans son arrêt Commune de Biarritz du 2 décembre 2022 (n° 460100), le Conseil d’Etat a jugé que :

  • aucune obligation de mise en concurrence ne s’impose, en droit national ou européen, préalablement à l’octroi d’un titre d’occupation du domaine privé ;
  • la directive « Services »  ne s’applique pas aux baux portant sur le domaine privé dès lors qu’ils ne constituent pas une autorisation d’accès ou d’exercice d’une activité de service au sens de la directive.

Cette position, critiquée par la doctrine, semblait méconnaître la portée de la jurisprudence Promoimpresa, dans laquelle la CJUE ne distingue nullement entre domaine public et domaine privé.

Dans sa réponse du 19 juin 2025, le gouvernement considère qu’en l’absence de jurisprudence complémentaire, tant nationale qu’européenne, il ne saurait être exclu, de manière générale et abstraite, que des obligations de mise en concurrence s’imposent également sur le domaine privé.

Il invite donc les gestionnaires publics à faire preuve de vigilance et recommande :

  • de procéder systématiquement à un examen in concreto des conditions dans lesquelles le titre serait octroyé, en examinant notamment  la nature de l’activité envisagée, la rareté de la dépendance domaniale ou encore l’existence d’un intérêt transfrontalier certain ;
  • de veiller à ce que la durée et la nature des titres délivrés restent compatibles avec l’impératif de remise en concurrence périodique prévu à l’article 12 de la directive « Services » et rappelé par l’arrêt Promoimpresa.

Par conséquent, en l’absence de cadre juridique établi, la prudence reste de mise. Si la mise en concurrence des titres d’occupation du domaine privé n’est pas juridiquement obligatoire à ce jour, elle peut s’avérer opportune et sécurisante, en particulier dans les situations à enjeux : rareté de la dépendance, activité économique à fort potentiel ou susceptible de présenter un intérêt transfrontalier.


Rép. Min. à QE n°02121, 19 juin 2025, JO Sénat, p. 3473

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