Dérogation pour la destruction d’espèces protégées (DDEP) – Parc éolien de la forêt de Lanouée (Morbihan) – Raison impérative d’intérêt public majeur (oui)
En confirmant l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Nantes sur la légalité de la DDEP délivrée dans le cadre du projet de parc éolien de la forêt de Lanouée (Morbihan), le Conseil d’État reconnaît pour la première fois qu’un projet de parc éolien constitue une « raison impérative d’intérêt public majeur », première condition de légalité d’une dérogation pour la destruction d’espèces protégées.
Pour caractériser l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur, les juges du fond s’étaient appuyés sur la capacité de production du projet (16 ou 17 éoliennes d’une puissance totale de plus de 51 MW, permettant l’approvisionnement en électricité de plus de 50 000 personnes), la fragilité de l’approvisionnement électrique de la région de la Bretagne (faible production ne couvrant que 8% des besoins de la région) et les objectifs de transition énergétiques au niveau européen, national et régional (directive du 23 avril 2009, loi du 3 août 2009, « pacte électrique » signé entre l’État, la Bretagne, l’ADEME, RTE et l’ANAH).
La condition tenant à l’absence de solution alternative satisfaisante se trouvait également remplie selon les juges du fond : plusieurs types d’EnR avaient été envisagés, l’étalement urbain et l’habitat dispersé de la région ne permettent que rarement de respecter les distances d’implantation d’un parc éolien avec les habitations, aucun périmètre de protection n’était recensé (Natura 2000, EBC, zones humides, etc.), la zone disposait de bonnes capacités de desserte et de raccordement aux réseaux.
Le juge de cassation laisse ainsi à l’appréciation souveraine des juges du fond, sous réserve de dénaturation, le point de savoir s’il n’existe pas de solution satisfaisante autre que le projet envisagé pour répondre à une raison impérative d’intérêt public majeur de nature à justifier, en application de l’article L. 411-2 du code de l’environnement, une dérogation aux d’interdictions visant à assurer la conservation d’espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats.
CE, 15 avril 2021, n° 430500, Tab. Leb.