Expropriation – QPC – Droit de rachat du bien en cas de rétrocession – Constitutionnalité (oui)
Par une décision du 22 novembre 2024, le Conseil constitutionnel a déclaré, avec une réserve d’interprétation, conformes aux principes issus de l’article 17 de la Déclaration de 1789 les dispositions de l’article L. 421-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique qui fixent un délai d’un mois pour signer le contrat de rachat en cas de rétrocession d’un bien exproprié.
En droit, il ressort de l’article L. 421-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique que l’ancien propriétaire d’un bien exproprié, ou ses ayants droit, sont fondés à solliciter la rétrocession du bien si celui-ci n’a pas été utilisé conformément à la déclaration d’utilité publique dans un délai de 5 ans.
L’article L. 421-3 du même code impose, à peine de déchéance, que le contrat de rachat soit signé et le prix payé dans un délai d’un mois à compter de sa fixation, soit à l’amiable, soit par décision de justice.
Au cas présent, d’anciens expropriés estimaient que ce délai d’un mois était trop court et ne pouvait être respecté, notamment lorsque le retard était dû à l’autorité expropriante, ce qui porterait atteinte au droit de la propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ainsi que par l’article 1 du protocole n° 1 de la CEDH.
Saisie à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité (Cass, Civ. 3ème, 5 septembre 2024, n° 24-40013), le Conseil constitutionnel a confirmé que les dispositions mentionnées de l’article L. 421-3 étaient bien conformes au bloc constitutionnel, en ce qu’elles ne portent pas atteinte à aucun autre droit ou liberté garanti.
Les Sages ajoutent néanmoins dans leur décision une réserve d’interprétation (considérant n° 9), en permettant d’écarter toute déchéance du droit de rétrocession si le non-respect du délai d’un mois précité n’est pas imputable aux anciens propriétaires du bien exproprié qui n’aurait pas reçu, dans un délai de cinq ans, la destination prévue par la DUP ou a cessé de la recevoir.
« 9. Toutefois, ces dispositions ne sauraient, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, être interprétées comme permettant que la déchéance du droit de rétrocession soit opposée à l’ancien propriétaire ou à ses ayants droit lorsque le non-respect du délai qu’elles prévoient ne leur est pas imputable ».
A toutes fins utiles, l’arrêt de renvoi de la Cour de cassation mentionnait plusieurs cas éventuels où le non-respect du délai d’un mois ne serait pas imputable au bénéficiaire du droit de rétrocession :
- le comportement de l’autorité expropriante ;
- les délais usuels d’établissement d’un acte authentique ;
- le délai de souscription d’un prêt bancaire pour financer le rachat du bien.
Conseil constitutionnel, Décision n° 2024-1112 QPC du 22 novembre 2024, Consorts F.