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QPC – Art. 233 de la loi « Climat et Résilience » – Préemption en « périmètres sensibles » délimités par le préfet

Par un arrêt en date du 25 septembre 2023, le Conseil d’État a renvoyé au Conseil Constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité à la Constitution de l’article 233 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Sur le contexte du litige, le Conseil d’État rappelle qu’avant que la législation ne soit modifiée en 1985, les « périmètres sensibles » étaient institués par le préfet. En 1985, la compétence est transférée aux départements, qui se voient reconnaître le droit d’instituer le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles ainsi délimités :

« En application des articles L. 142-1 et L. 142-4 du code de l’urbanisme, dans leur rédaction antérieure à la loi du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en œuvre de principes d’aménagement, des périmètres sensibles pouvaient, après avis du conseil général et des communes concernées, être délimités par le préfet dans les départements inscrits sur une liste établie par décret en Conseil d’Etat. (…)

3. La loi du 18 juillet 1985 a modifié les articles L. 142-1 et suivants du code de l’urbanisme organisant le régime de protection des périmètres sensibles en confiant au département la compétence pour élaborer et mettre en œuvre une politique de protection, de gestion et d’ouverture au public des espaces naturels sensibles. L’article L. 142-3 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de cette loi, prévoyait que, pour la mise en œuvre de cette politique, le conseil général pouvait créer des zones de préemption à compter du 1er juin 1987. Le huitième alinéa de l’article L. 142-12 du même code relatif à l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions disposait que : « (…) Le droit de préemption prévu à l’article L. 142-3 dans sa rédaction issue de la loi (…) s’applique dès l’entrée en vigueur du présent chapitre à l’intérieur des zones de préemption délimitées en application de l’article L. 142-1 dans sa rédaction antérieure (…) ».

Toutefois, le Conseil d’État constate qu’à la suite de la recodification du code de l’urbanisme, « le droit de préemption prévu aux articles L. 215-1 et suivants du code de l’urbanisme n’était plus applicable dans les zones de préemption créées par les préfets au titre de la législation sur les périmètres sensibles avant l’entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 1985, sauf à ce que le département les ait incluses depuis dans les zones de préemption qu’il a lui-même créées au titre des espaces naturels sensibles ».

L’article 233 de la loi « Climat et Résilience » prévoit que « Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validées les décisions de préemption prises entre le 1er janvier 2016 et l’entrée en vigueur du présent article, en tant que leur légalité est ou serait contestée par un moyen tiré de l’abrogation de l’article L. 142-12 du code de l’urbanisme par l’ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme« .

Or, à date, du fait de cette disposition, un certain nombre de décisions de préemption concernant des biens situés dans un périmètre sensible délimité par le préfet sous application de la législation antérieure à 1985, ne peuvent désormais plus être contestées. Compte tenu de ce constat, le Conseil d’État a considéré que l’argumentation développée par les requérants, selon laquelle cette disposition méconnaîtrait l’article 16 de la DDHC car elle ne se justifierait pas par un motif impérieux d’intérêt général, présente un caractère sérieux :

Ces dispositions du II de l’article 233 de la loi du 22 août 2021 sont applicables au litige au sens et pour l’application de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 et n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel. Alors qu’il ressort des éléments versés au dossier du Conseil d’Etat dans le cadre de l’instruction de la présente question prioritaire de constitutionnalité qu’à la date d’entrée en vigueur de l’article 233 de la loi du 22 août 2021 un très petit nombre de décisions de préemption prises entre le 1er janvier 2016 et le 25 août 2021 portant sur des biens situés dans une zone de préemption créée avant le 1er juin 1987 n’étaient pas devenues définitives, le moyen tiré de ce que les dispositions de validation en litige portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, en particulier méconnaissent l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen faute d’être justifiées par un motif impérieux d’intérêt général, soulève une question présentant un caractère sérieux.

Conseil d’État, 25 septembre 2023, n°464315, GFA Jourdain Pugibet

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